Qui dit samedi gris, dit samedi en Lamborghini ! Sauf que la caisse que cajole Amy est estampillée du L d’une autre marque, mais qu’importe : c’est tout sauf une raison pour laisser mon groove retomber ! J’aime bien les clichés, alors quand Amy m’a proposé de m’embarquer dans son bolide, je suis allée me procurer une PUTAIN de combinaison de pilote. Genre en cuir rouge et blanc avec des écussons un peu partout. Mes fausses Ray-Ban Aviator sur le nez, j’avance au ralentit sur le circuit en balançant la tête pour faire voler mes cheveux comme dans les films complètement débile que je me plais à regarder les soirs de pluie. Bon sang, comme j’ai hâte de voir la tête d’Amy ! Elle n’est plus qu’à quelques mètres de moi, mais le truc c’est que ma tête bouge tellement que son visage n’est qu’une tache floue dans mon champ de vision en mouvement perpétuel. Je suis bientôt assez proche pour entendre ma pote râler après un pauvre type avant de s’adresser à moi quelques secondes plus tard : « Prête ? ». Je tape la pause, les mains sur les hanches et une grimace Sexy-Crazy sur le visage : « More than ever, Baby ! ». Je m’avance et lui balance une mini claque sur les fesses avant de me tourner vers le quadra’ qui nous dévisage. Je lui offre mon regard le plus assassin avant de m’approcher d’un bond en feulant comme un chat ! Je ne sais pas ce qu’il a dit à Amy pour l’énerver ni si son coup de gueule était justifié, mais j’aime bien rajouter mon grain de sel dans les trucs, surtout lorsque je n’ai strictement rien à voir avec l’histoire ! Le gars recule d’un bond, les yeux ronds, et moi j’esquisse un sourire satisfait. Ça promet d'être marrant tout ça !

Après une dernière vanne à l’idiot du village qui n’a pas compris qu’il n’était vraiment pas prêt d’avoir le dernier mot avec elle, Amy entre dans la voiture et s’installe côté conducteur. « Z'êtes bien charmante, j'vous emmène faire un tour mademoiselle ? » qu’elle me dit une fois la vitre baissée, et je devine qu’il y a là une dernière pique à Monsieur Gros-Lourd ici présent. Alors du coup, forcément, je surenchéri. Parce que voilà quoi. « Et dire qu’il y a vraiment des pauvres types dont la bagnole et le seul argument séduction ! » Sur ce je rentre dans la voiture sans même accorder un dernier regard à notre victime du jour, mais je suis à peu près sûre que si ses yeux avaient le pouvoir de fusiller quelqu’un je serais actuellement aussi étanche et homogène qu’un morceau de gruyère.  
Je claque la portière et inspecte l’intérieur de la voiture. C’est nickel chrome et ça me donne envie de foutre le bazar pour embêter Amy. J’aurai tellement dû remplir mon sac de vieux papiers de bonbons et de tickets de caisse tout froissés et faire mine de ‘’malencontreusement’’ renverser tout ça dans la voiture ! Humf. Pas grave, ce sera pour une prochaine fois… J’attache mon espèce de ceinture qui n’en est pas vraiment une – c’est plutôt un genre harnais, un peu comme dans les manèges – et me tourne vers Amy : « Vers l’infini et l’au-delà ? » En gros, elle a mon feu vert pour envoyer la sauce.

Les pneus qui crissent, les virages serrés, les mégas dérapages et les gros changements de rapports : je suis sûre que vous vous dite que ça doit être génial à vivre. Aha ! Pauvre naïfs… Si jamais on vous propose ça, ne faites pas la même erreur que moi : fuyez ! Parce que l’enfer sur Terre existe les gars…
Je n’ai pourtant pas l’habitude de me surestimer pour quoi que ce soit, mais je n’aurai vraiment jamais cru qu’un petit tour de circuit avec Amy au volant aurait pu être aussi… Aussi… Oh merde, j’en perds mes mots… Vous avez déjà eu la sensation que votre estomac vous remonte tout droit dans la gorge pendant que votre cerveau tente de se faire la malle en passant par vos sinus ? Bah c’est grosso modo ce que je ressens là tout de suite… Je me cramponne à la poignée de la portière et essaie de voir si c’est plus pire ou moins pire lorsque je ferme les yeux ou lorsque je fixe la route pendant qu’Amy s’amuse à me secouer dans tous les sens. Je me maudis intérieurement : les manèges à sensations me font plus rire qu’autre chose et j’ai vraiment cru que quelques tours de circuits seraient globalement similaires. Stupide, stupide, stupide Danny !

Soudain, la voiture s’arrête pour de vrai. Genre pas pour repartir de plus belle en marche arrière ou pour faire brûler la gomme des pneus sur l’asphalte en redémarrant en trombe : elle S’ARRÊTE et le moteur se coupe. « Oh, merci mon Dieu. » Je lève les yeux au ciel et dé-zippe le haut de ma combinaison comme si elle m’empêchait de respirer correctement. « C’est bon, c’est bon : j’avouerai tout ce que tu voudras mais s’il te plait laisse-moi descendre. » que je dis d’une petite voix toute faiblarde que cette veine tentative d’humour ne parvient pas à dédramatiser. Je détache l’espèce de harnais qui sert de ceinture et baisse la vitre pour avoir un peu d’air, les yeux toujours fixés sur le plafond. Mais j’ai beau regarder en l’air et avoir une petite brise fraîche sur mon visage, la sensation de nausée ne fait que devenir de plus en plus grande. J’essaie bien de la réprimer, mais mon estomac ne fait aucun effort pour me soutenir : ni tenant plus, je passe la tête par la fenêtre et dégobille tout mon petit déj’… Une chance, j’ai épargné la carrosserie de la voiture. Par contre, les pompes flambant neuves du  gars de tout à l’heure ont pris cher de chez cher…

«  Soit mignon et ferme un peu ta gueule. »

De toute évidence, si je ne m’étais pas autant concentrée sur mon parcours, j’aurais très bien pu voir avec quelle force Danny s’était cramponnée à la portière pendant le trajet. Heureusement que cette dernière n’est pas revêtue de cuir : La voiture ne m’appartenant pas, j’suis pas sûre que le gérant du circuit aurait apprécié les marques d’ongles dessus. Mais d’un autre côté, ça lui aurait fait les pieds.
Donc, j’arrête le monstre. Le moteur émet un dernier vrombissement avant de s’étouffer en un gémissement de plus en plus faible qui fait cesser les tremblements de la voiture. J’ouvre instantanément les fenêtres, après que Danny ait imploré son dieu de l’arrêt de la voiture, celui-là pour lequel je me prends en lâchant un « Mais je t’en prie. » afin d’essayer de détendre vainement la chose. Son teint semble décidé à imiter quelconque lumière clignotante passant du verdâtre au blanchâtre : Il ne sert à rien de tergiverser, elle est malade en voiture. A moins que ce soit moi qui doive remettre ma conduite en question ? Mais non, bien sûr que non.
Je ris légèrement à sa tentative de plaisanterie et commence à ouvrir la bouche pour y répondre, sauf que la miss se penche à travers la fenêtre juste au moment où l’autre couillon débarque vers nous. Il s’apprête très sûrement à nous offrir une autre de ses remarques ô combien utiles, ce à quoi je m’attends avant d’entendre quelque chose qui ressemble davantage à une mauvaise imitation d’un dragon en colère qu’à l’une d’elles. Je retiens un léger rire, aucunement dérangée par la bouffe que Danny vient de balancer parterre. « T’as pris un gros risque en débarquant ici après avoir avaler quelque chose. Toutes mes félicitations. » Que je lance alors. Je me prépare à applaudir, sauf que la voix furieuse de Sean se met à rugir : On dirait que Danny n’a pas épargné ses chaussures.

AVENGEDINCHAINS

HRP: